Le notaire, par l’aggravation de son devoir d’investigation devient le gendarme de la transaction immobilière.
INTÉRÊT POUR L’AGENT IMMOBILIER :
Bien suivre la vente de l’avant contrat à la signature chez le notaire !
PRINCIPE :
La Cour de cassation rappelle que la bonne exécution de ce devoir suppose que le notaire se livre à des vérifications et à des investigations. Ainsi, l’officier public ne saurait se fier aux déclarations des parties si elles conditionnent la validité et l’efficacité de l’acte dressé. Il ne peut pas davantage se contenter d’énonciations ambiguës si d’elles dépendent l’étendue et la teneur des droits transmis.
FAITS:
La situation est classique : vente d’un bien appartenant à deux époux : le mari a déclaré être « chef de cuisine » et l’épouse « sans profession ».
L’agent immobilier a bien précisé au notaire que les époux exploitaient un restaurant.
Vente du bien, remise immédiate du prix, action en inopposabilité de l’opération compte tenu de la faillite de Madame « sans profession » !
L’acquéreur « chafouin » engage la responsabilité du notaire qui n’a pas vérifié l’existence d’une faillite (jugement d’ouverture trois ou quatre jours avant la vente).
Le juge du fond a rejeté la responsabilité du notaire, car rien ne laissait supposer que Madame était en fait commerçante.
La Cour ne l’a pas entendu de cette oreille et a condamné le notaire sur le visa de l’article 1382 du Code civil : « si le notaire, recevant un acte en l’état de déclarations erronées d’une partie quant aux faits rapportés, n’engage sa responsabilité que s’il est établi qu’il disposait d’éléments de nature à faire douter de leur véracité ou de leur exactitude, il est, cependant, tenu de vérifier, par toutes investigations utiles, spécialement lorsqu’il existe une publicité légale, les déclarations faites par le vendeur et qui, par leur nature ou leur portée juridique, conditionnent la validité ou l’efficacité de l’acte qu’il dresse ».
Il lui appartenait « de vérifier les déclarations des vendeurs sur leur capacité de disposer librement de leurs biens, notamment en procédant à la consultation des publications légales afférentes aux procédures collectives ».
Concrètement, le notaire se devait de consulter le BODACC afin de s’assurer de la solvabilité des vendeurs et surtout de leur pouvoir de disposer du bien en cause.
L’histoire ne dit pas quelle a été la responsabilité de l’agent immobilier, mais il est fort à parier qu’il a à minima perdu le droit à sa rémunération.
NEXICONSEIL :
Le notaire devient le véritable gendarme du bon déroulé de la transaction, sous sa responsabilité.
Sauf qu’il s’agit du gagne-pain de l’agent immobilier : il faut donc anticiper !
En effet, le notaire ne voit pas les personnes (à l’exception de ses clients récurrents). L’agent immobilier suit l’affaire depuis le début. Ici, le négociateur savait que les époux vendeurs tenaient un restaurant et il est difficilement imaginable, dans une petite région que leur faillite n’ait pas été connue.
Il connait donc les personnes (vendeur et acquéreur) mieux que quiconque. Il faut qu’il y ait une réelle collaboration entre le professionnel de la négociation et celui du titre de propriété.
Le notaire n’est pas un sous-traitant, à traiter à la légère ! : le travail du négociateur ne s’arrête certainement pas à la transmission du « compromis au notaire ».
Source : CIV 1° 29 juin 2016 n° 15 – 17591