Intérêt pour l’agent immobilier :
Rappel des principes régissant le départ d’un gérant par rapport à l’activité de la société. La question est simple : peut-on, en toute impunité et sans avoir à verser des dommages intérêts, s’installer en face et démarcher la clientèle de l’ancienne société ?
La réponse est oui et pour éviter bien des déconvenues, il faut prendre des précautions.
FAITS
Ambiance de « franche et saine camaraderie » à l’ile de la réunion !
Le gérant d’une société d’informatique présente sa démission et moins d’un mois après avoir quitté ses fonctions et toujours associé, a démarché activement trois des clients importants. Il a même proposé à l’un d’entre eux des prestations identiques à un prix légèrement inférieur.
Pour ce faire, il a constitué une nouvelle société et a embauché un ancien salarié de l’ancienne récemment licencié pour faute lourde (il avait tout simplement proposé à titre personnel ses services à l’un des clients de la société employeur).
Notre gérant avait également, au moment du rachat de ses parts, souscrit l’engagement de ne pas démarcher certains clients, alors que les démarchages avaient été déjà effectués entre la démission et ledit rachat.
D’une manière logique, la Cour d’appel l’a condamné à verser des dommages intérêts.
La Cour de cassation n’a pas suivi les juges du fonds, sur le visa de l’article 1382 (responsabilité délictuelle) : « … en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser des actes de concurrence déloyale à l’encontre (du gérant démissionnaire), qui n’était tenu, en sa qualité d’associé, à aucune obligation de non-concurrence, la cour d’appel a violé … »
LE CONTEXTE JURIDIQUE
Les actes incriminés ont été réalisés après la démission de la gérance et avant la cession de parts et la prise d’engagements.
Le principe est simple : liberté d’entreprendre, mais il faut effectuer une concurrence loyale.
Le tout « sauf stipulation contraire », par exemple dans les statuts de la société, par une décision des associés prise à l’unanimité ou par une convention extra statutaire dument signée par la personne qui va quitter la société.
En dehors de ces cas, pas d’obstacle à la liberté d’installation… sauf les manœuvres entrant dans la définition de la concurrence déloyale (fausser frauduleusement l’égalité de chance entre les entreprises – mensonges, ententes etc…)
LA DÉCISION DE LA JURIDICTION
L’associé peut tout à fait se réinstaller, mais sa responsabilité pourra être engagée en cas de concurrence déloyale avec son ancienne société.
Si l’égalité de chances entre entreprises est respectée, pas de problème.
Attention, il s’agit bien de l’associé et non plus du gérant (au cas particulier, la prospection a été effectuée entre la démission de la gérance et la vente des parts).
Sauf convention contraire (ici l’engagement a été pris dans la cession de parts, après la prospection).
N’oublions pas qu’il n’y a aucune propriété sur une clientèle, qui est libre de ses choix.
NEXICONSEIL :
Une séparation ? ça arrive : Il faut prendre des précautions.
La démission d’un gérant associé doit être concomitante avec la cession de ses parts, et pourquoi pas dans le même acte.
Il faut dans cet acte, règlementer les futures relations et prévoir, si possible, une clause de non concurrence limitée dans l’espace et dans le temps. La cession de parts n’est pas une cession de fonds de commerce où l’interdiction de réinstallation est une conséquence de l’obligation de garantie due par le vendeur.
Source : COM 3 mars 2015 F – D n° 13 – 25237